Martine,
tout le monde la connaît, et si je dis tout le monde,
ce n'est pas par hasard : pas moins de 45 millions d'exemplaires
vendus à ce jour en France ainsi que dans de nombreux
pays. Depuis bientôt 50 ans, (Martine à la
ferme, le premier album de la série, sort en 1954),
Martine entraîne les jeunes lecteurs dans ses aventures
simples de la vie de tous les jours. Déjà 50
ans ? Déjà, oui, et je suis d'accord avec vous,
Martine ne les fait pas ! Même si certaines mauvaises
langues disent que la série a mal vieilli, je vous
affirme que cette petite fille ne peut pas prendre de rides
(l'un des avantages des êtres de papier). Elle vit même
bien dans son époque. A l'occasion de la parution,
le 15 octobre dernier, de Martine et ses marmitons,
(le 51e album) ainsi que de la réédition de
Martine fait ses courses
(fac-similé
de l'édition de 1964), venez donc lire une petite apologie
de ses histoires sans histoires... ou d'une série qui
a su préserver sa fraîcheur et son regard tendre
et complice sur la curiosité des enfants.
La
naissance de Martine... (histoire d'être incollable
sur le sujet !)
En
1953, la maison Casterman souhaite lancer une série
d'albums mettant en scène une fillette enthousiaste.
C'est tout naturellement vers Gilbert Delahaye que les éditeurs
s'adressent, car ils connaissent le talent d' écriture
de leur ouvrier typographe : l'homme, employé depuis
1944 par la maison qui hégerge Tintin, est en effet
poète avant tout (il obtient d'ailleurs le Prix Prévert
en 1985). Ainsi, chaque 1er janvier des années 1954
à 1997, Monsieur Delahaye (jusqu'à sa mort)
crée une nouvelle aventure pour Martine, devenue son
héroïne. Marcel Marlier, quant à lui, fait
déjà partie des dessinateurs phares de la maison
Casterman quand un responsable éditorial vient le voir
pour lui proposer de travailler avec Gilbert Delahaye sur
les albums de Martine. Sûres de son talent (alors qu'il
est encore étudiant, le dessinateur est primé
par les éditions La Procure à Namur et
est vite contacté pour élaborer des ouvrages
pédagogiques) les éditions ne se trompent pas
: la série connaît un véritable succès,
et marque l'imagination de nombreuses petites filles, d'hier
et d'aujourd'hui.
Des
aventures simples mais riches en découvertes
Martine ne part jamais dans l'espace,
ne rencontre pas de super héros et ne se transforme
pas en fée à chaque page. Elle vit, tout simplement,
et à travers elle, au gré des albums, les lecteurs
rencontrent tour à tour cuisiniers, jardiniers, ou
encore gens du cirque. Ils s'initient aux petits plaisirs
de la vie de tous les jours, au fil des opportunités.
Avec Martine, Patapouf, son petit chien, et Philippe, son
petit frère, on retrouve Ludo et les autres, et on
passe un bon moment. Mais attention ! On apprend, et avec
sérieux ! Enfin... ça dépend qui !
Si Martine n'a pas de baguette magique comme Harry Potter,
elle a juste de grands yeux bien ouverts qui s'écarquillent
quand il le faut. Elle apprend à faire des petits pains,
elle est fière de faire les courses toute seule, ou
de voyager en train. Ses albums sont plein de vie, plein de
gaîté, plein d'innocence, et c'est aussi simple
que ça. C'est peut-être là la recette
de son succès !
Démodée ?
Martine ressemble à toutes les petites
filles. Elle n'a jamais été démodée,
puisqu'elle a toujours suivi la mode ! En
petite robe chasuble quand les années 60 le demandaient,
en T-shirt, jean's et baskets aujourd'hui, Martine a toujours
su être à la page. Elle fait maintenant des stages
dans le cadre de la semaine du goût, et part en classe
de découverte. Elle se fait même baby-sitter
! Plongez-vous dans l'observation des dessins de Marcel Marlier.
Son souci du détail est grand. Il a l'oeil, et sait
que les sweat-shirts d'aujourd'hui ont des capuches, et que
ce sont des baskets qu'il faut avoir aux pieds, rien d'autre.
Bien sûr, Martine fait ses courses n'est pas
un album inscrit dans la réalité de 2001. Tout
comme d'autres albums, les premiers, le livre a vieilli. Seulement,
en vieillissant, ils ont pris de la valeur : ces tranches
de vie sont autant de souvenirs des années 50, 60 et
70... que les collectionneurs avertis s'arrachent ! Casterman
réédite en tirage limité l'album qui
entraîne Martine et ses lecteurs dans un grand magasin.
Amateurs de mode, courez l'acheter ! Des mannequins au vendeuses,
les tenues sont plus vraies que sur les photos des yéyés
! Regardez bien les caisses enregistreuses, les produits,
les coiffures et la déco. C'est rétro, et vraiment
à la mode. Car tout ce qui a vieilli n'est aujourd'hui
plus ringard, et tout ce qui est ringard redevient à
la mode.
Qui a dit que Martine avait fait son temps ?
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Delphine
Lorho
Novembre 2001 |
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